Élections européennes : comment l'UE s'attaque à la désinformation en ligne

Une toile géante faisant la promotion des élections européennes, au Parlement européen, le jeudi 11 avril 2024 à Strasbourg.
Une toile géante faisant la promotion des élections européennes, au Parlement européen, le jeudi 11 avril 2024 à Strasbourg. Tous droits réservés Jean-Francois Badias/Copyright 2024 The AP. All rights reserved.
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Par Oceane Duboust
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Cet article a été initialement publié en anglais

Voici un aperçu des efforts déployés en Europe pour lutter contre la désinformation à l'approche des élections de juin.

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La désinformation et les contenus générés par l'intelligence artificielle (IA) suscitent de plus en plus d'inquiétudes à l'approche des élections européennes de juin.

Le mois dernier, la Commission européenne a publié des recommandations destinées aux plateformes numériques comptant plus de 45 millions d'utilisateurs européens par mois"afin d'atténuer les risques systémiques en ligne susceptibles d'affecter l'intégrité des élections".

En outre, de nombreuses plateformes se sont engagées à respecter le code de bonnes pratiques de l'UE "afin de lutter contre la désinformation dans l'ensemble de leurs services", d'après un porte-parole de la Commission.

Nous nous attendons à ce que les principaux discours de désinformation aient des nuances très nationales et locales.
Tommaso Canetta
Directeur adjoint de la vérification des faits de l'Observatoire européen des médias numériques

Les experts qui ont étudié les précédentes élections dans les pays européens ont noté que la désinformation peut prendre plusieurs formes, les principaux discours ciblant généralement le changement climatique, l'immigration et le soutien à l'Ukraine.

"Compte tenu de la nature particulière des élections européennes, nous pensons que la situation sera très spécifique à chacun des États membres", explique Tommaso Canetta, directeur adjoint de la vérification des faits de l'Observatoire européen des médias numériques (EDMO), à Euronews Next.

"Nous nous attendons donc à ce que les principaux discours de désinformation aient des nuances très nationales et locales".

Roberta Schmid, rédactrice en chef pour l'Allemagne et l'Autriche de la société américaine NewsGuard, qui évalue les sites d'information, convient que de fausses déclarations concernant les réfugiés ukrainiens et les politiques relatives au changement climatique sont susceptibles d'être diffusées.

Elle remarque également que "la plupart des fausses informations sont personnelles, qu'elles concernent souvent des politiciens spécifiques".

Les vérificateurs de faits tiennent compte du "niveau de risque" d'une fausse information, mais aussi de "l'ampleur de sa diffusion" pour choisir celles auxquelles s'attaquer en priorité.

Les faux enregistrements sonores sont la principale préoccupation

Roberta Schmid estime que l'IA représente un "risque supplémentaire qui vient s'ajouter aux risques déjà existants".

Pour Tommaso Canetta, si l'IA générative a fait un bond technique au cours des derniers mois, les images et les vidéos générées par l'IA ne sont pas encore entièrement réalistes.

En revanche, les faux enregistrements sonores peuvent être nettement plus convaincants, en raison de l'absence d'indices visuels.

"Les "deepfakes" existent depuis un certain temps déjà, mais ils s'améliorent de plus en plus. Il existe aujourd'hui des deepfakes vocaux vraiment ressemblants", explique Roberta Schmid.

"Il est difficile pour l'utilisateur moyen de détecter l'origine artificielle du contenu", précise Tommaso Canetta.

Lors des élections slovaques de 2023, Michal Šimečka, chef du parti progressiste, a été victime de la diffusion d'un faux enregistrement dans lequel on l'entendait évoquer un trucage des votes avec un journaliste.

"Il faut du temps pour démystifier ce type de contenu. Cela peut donc être potentiellement préjudiciable pour les élections", ajoute Tommaso Canetta.

La plupart des partis politiques européens ont signé un code de conduite pour les élections, selon lequel ils s'engagent à "s'abstenir de produire, d'utiliser ou de diffuser des contenus trompeurs".

Ce code de pratique sur la désinformation stipule également que les signataires s'engagent à traiter les questions telles que les "deep fakes malveillants". Toutefois, il n'existe actuellement aucun système infaillible pour les détecter.

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Les experts ont également prévenu les utilisateurs qu'ils ne devaient pas faire confiance aux chatbots utilisant l'IA, car ils sont susceptibles d'avoir des "hallucinations" et de communiquer de fausses informations de manière très réaliste.

L'un des phénomènes qui suscitent une inquiétude croissante est la création de "deepfakes" pornographiques dirigés contre des candidates.

La Première ministre italienne, Giorgia Meloni, qui en a été victime, demande 100 000 € de dommages et intérêts aux auteurs du deepfake, selon la BBC.

De nombreux outils pour lutter contre la désinformation sur les réseaux sociaux

La Commission européenne a convié toutes les très grandes plateformes et les moteurs de recherche à un atelier le 24 avril, durant lequel les participants ont travaillé sur "des scénarios dans lesquels de multiples instruments pouvaient être utilisés pour faire face à des campagnes de désinformation".

Récemment confrontées à plusieurs scandales, certaines plateformes de réseaux sociaux ont pris des mesures pour renforcer leur surveillance de la désinformation.

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TikTok, propriété de la société chinoise Bytedance, a mis en place un centre en ligne dédié aux élections européennes, précisant que 30 % des eurodéputés étaient déjà présents sur la plateforme.

"Nous travaillons avec 15 organisations de vérification des faits à travers le monde qui prennent en charge plus de 40 langues", déclare la société à Euronews Next, ajoutant que les vidéos avec un "contenu non vérifié" étaient signalées aux utilisateurs et n'apparaissaient pas dans leur flux personnalisé.

Quelques semaines après l'annonce de TikTok, Meta a également déclaré qu'elle allait mettre en place son propre centre d'opérations pour les élections"afin d'identifier les menaces potentielles et de mettre en place des contre-mesures en temps réel".

Dans un autre communiqué, la société mère de Facebook a indiqué qu'elle prévoyait de commencer à étiqueter les contenus générés par l'IA en mai 2024.

Google a également renforcé son groupe de travail anti-désinformation Jigsaw et se prépare à lancer une campagne dans cinq pays de l'UE, selon Reuters. L'entreprise commence par ailleurs à mettre en place des restrictions sur les requêtes liées aux élections adressées à son chatbot Gemini AI.

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Le réseau social X, anciennement Twitter, n'a pour l'instant fait aucune annonce liée aux élections.

Les entreprises s'exposent à des amendes pouvant aller jusqu'à 6 % de leur chiffre d'affaires annuel mondial si elles ne se conforment pas à la loi sur les services numériques (DSA), qui exige des plateformes qu'elles combattent les manipulations électorales.

Les experts recommandent aux électeurs d'être prudents.

"Il est important de vérifier la source des informations partagées, d'autant plus que des sites web "sosies" peuvent être créés pour imiter des médias dignes de confiance", déclare Roberta Schmid.

"Les médias traditionnels restent la source d'information la plus fiable", ajoute Tommaso Canetta."Pratiquez un scepticisme sain en évitant de tomber dans le piège de ne jamais croire ce que vous voyez. Il doit y avoir un juste milieu".

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